Comment concilier développement durable et entrepreneuriat ?

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Développement durable ou responsabilité sociétale des entreprises sont autant de termes qui impactent toujours davantage la vie des sociétés. Mais de quoi parle-t-on au juste et que peuvent concrètement faire les entrepreneurs? Dans le cadre de la semaine de la durabilité, la Fondation d’aide aux entreprises est allée à la rencontre de Bean2me, Fleuriot et Magic Tomato, trois entreprises genevoises qui mettent le développement durable au cœur de leur activité.

Quant à savoir si entrepreneuriat et développement durable sont compatibles, les trois entreprises interrogées sont unanimes. Aujourd’hui, créer une société sans intégrer pleinement les différents aspects de la durabilité menace fortement la pérennité de l’entreprise. Leurs clients les choisissent parce qu’elles intègrent et vivent le développement durable dans l’ensemble des services et produits proposés.

 

Bean2me :

En s’entretenant avec Aurélien Gaufrenet, l’un des trois co-fondateurs de Bean2me, on sent qu’en matière de durabilité rien n’est laissé au hasard. « Si l’on sait toujours ce que l’on doit améliorer, proposer des actions concrètes durables et locales fait partie de notre ADN, de nos convictions intimes » explique-t-il. Mais alors, de quelle façon cette jeune pousse tente-t-elle de faire sa part en faveur de plus de durabilité ?

Bean2me propose depuis ses débuts en 2017 aux entreprises de Genève et sa région, une solution flexible de café en grains de qualité, de proximité, éco-responsable, du sourcing jusqu’à la tasse tout en affranchissant le client des contraintes logistiques et opérationnelles. Elle a étoffé son offre avec la mise à disposition de corbeilles de fruits, de bars à fruits secs et l’organisation de petits-déjeuners, en conservant toujours la même philosophie : Manger sain, partager des moments de convivialité, travailler avec des artisans locaux pour offrir des produits de qualité.

 

Devenir entrepreneur et vivre pleinement ses convictions environnementales

Les valeurs qui animent les co-fondateurs pour plus de durabilité sont personnelles et présentes de longue date, mais en travaillant pour certaines grandes entreprises, ils n’avaient pas l’impression de pouvoir être de véritables acteurs du changement. L’entrepreneuriat leur a donné l’opportunité d’appliquer concrètement leurs convictions comme par exemple le recyclage du marc de café. Avec leur connaissance des filières et l’intérêt de leurs clients, cela fait désormais partie intégrante de leurs démarches de gestion des déchets et des ressources. « C’est un aspect vertueux ressenti comme tel par nos clients, loin de tout green washing. Récupérer le marc de café lors des nouvelles livraisons concrétise l’idée que l’on se fait de nous et fait grandir la confiance mutuelle tout en fidélisant le client » explique Aurélien Gaufrenet.

Dès le départ, ils appliquent leurs principes durables et optent ainsi pour des véhicules électriques pour la livraison du café, malgré les coûts deux fois supérieurs et leur rayon d’action limité. Tout n’a pas été possible à mettre en place dès le départ. Trouver un emballage pour les paquets de café à même de garantir conservation et éthique a nécessité d’acquérir de nouvelles connaissances, mais Bean2me fournit désormais le café uniquement avec des paquets intégralement biodégradables, garantissant la fraîcheur du café.

Bean2me garantit un sourcing respectueux de l’homme et de la nature, même de l’autre côté de la planète. Elle souhaite aussi valoriser auprès de sa clientèle B2B le côté « entreprise locale » en proposant des actions sur le territoire suisse. « A notre échelle nous arrivons à planter 400 arbres par le biais de notre projet dans le Jura suisse visant à compenser notre empreinte environnementale » précise Aurélien Gaufrenet. « Si c’est possible pour nous et vu l’importance du défi climatique, toutes les entreprises devraient faire leur part ».

Un objectif prioritaire pour l’équipe de Bean2me est de pouvoir connaître l’empreinte carbone d’une tasse de café. Pour le co-fondateur, « pouvoir le communiquer aux clients B2B, c’est un idéal, mais qui nécessite un financement, notamment pour payer un cabinet d’audit. Le Covid a limité notre activité et l’on doit attendre un retour à la normale pour garantir le financement nécessaire ». Gageons qu’ils seront bientôt à même de relever ce prochain défi !

www.bean2me.ch

Fleuriot :

Fleuriot Fleurs Genève est un fleuriste d’art présent à Genève depuis 1920 qui compte 50 employés et vend environ 6 millions de tiges par an. Maison familiale depuis ses débuts, la maison horticole haut de gamme est leader dans sa branche et réalise, depuis ses six boutiques, des créations florales exclusives pour tous les moments de la vie. Depuis cinq ans, les rennes de l’entreprise sont passées dans les mains de Charles Millo et de son épouse Valérie. Horticulteur de formation, Charles Millo a commencé par diriger, dès 1989, l’activité de production de plantes et fleurs familiale basée à Satigny, entreprise Millo & Cie, avant que son père ne lui transmette la direction des boutiques. Charles Millo possède également avec Monsieur Marc Zeller, la société Biogaz Mandement à Satigny qui valorise les déchets organiques d’agriculteurs en biogaz et permet ainsi de chauffer les différentes serres. Très investie à limiter son empreinte écologique sur l’environnement, la société améliore constamment l’ensemble des aspects spécifiques au métier.

 

Favoriser les circuits courts et réduire son empreinte

A Satigny, Fleuriot possède ses propres serres à même de fournir une bonne partie des précieuses tiges qui composent les arrangements floraux à destination des particuliers et des entreprises. Pour Charles Millo : « en travaillant avec des produits périssables, il est important de pouvoir cultiver des fleurs localement afin de garantir la fraîcheur tout en respectant les saisons et en limitant le Co2 inhérent au transport. Ainsi, les pivoines ou les hortensias qui seront ajoutées aux différents arrangements proviennent directement de nos propres cultures ». Malgré une production propre conséquente, Fleuriot se fournit en fleurs à l’extérieur et privilégie pour cela des fournisseurs locaux genevois également labélisés GRTA. Hors saison, les transports par avion sont limités au strict minimum et les pays européens voisins sont privilégiés, notamment pour l’importation des roses qui restent un produit incontournable toute l’année.

De nombreux efforts sont également entrepris pour réduire au maximum la production de déchets et économiser l’eau tout en limitant les intrants dans les sols. Ainsi, Fleuriot propose à sa clientèle des emballages en papier plutôt qu’en cellophane et des ficelles à base de chanvre. Pour éviter des rejets dans l’environnement, l’eau utilisée pour les tulipes cultivées à Satigny est traitée avec de l’oxygène produite par l’entreprise. Enfin, pour que le cercle soit complétement vertueux, l’ensemble des déchets verts sont acheminés à Satigny pour produire le biogaz qui permettra de chauffer les serres. Ainsi, 1500 tonnes de Co2 par année ont pu être économisées depuis 1990.

 

Livraisons locales pauvres en Co2

Pas de développement de l’entreprise possible sans développement durable. Aujourd’hui, même labellisées, il est de moins en moins question de faire venir des fleurs du Sud. « Quand 80% des roses sont produites au Kenya et ailleurs dans l’autre hémisphère cela soulève inévitablement des questions écologiques. Chez Fleuriot, 35% des fleurs viennent de Genève et l’entreprise indique clairement la provenance des plantes » précise son directeur. Certaines cultures coûtent effectivement trop cher à produire en Suisse en grande quantité. C’est le cas pour la rose qui demande beaucoup de manutention. Mais Fleuriot a fait le choix de se limiter à des fournisseurs européens limitant ainsi fortement le bilan carbone lié au transport.

Désormais, un cargo-bike avec une remorque permet de remplacer un véhicule thermique utilisé jusqu’à peu pour les livraisons aux entreprises dans un rayon de cinq kilomètres. Un autre projet en lien avec la mobilité des entreprises du groupe devrait se concrétiser d’ici 2024 et doit permettre la transition vers des véhicules se mouvant uniquement grâce au biogaz produit en interne.

Le cahier des charges des entreprises qui font appel à Fleuriot implique de respecter de plus en plus l’environnement pour leurs commandes. Si l’entreprise répond aux nouvelles demandes, le directeur précise que « la difficulté est toujours d’arriver à 100% de durable. Nous ne voulons pas faire du green washing et c’est pour cela que nous communiquons sur nos engagements en faveur du local, mais encore peu sur toutes nos démarches en faveur de l’environnement. Nous remarquons toutefois que nos clients sont pleinement conscients de ce que nous entreprenons ». Si le groupe s’est fixé de couvrir en énergies renouvelables 100% de ses besoins d’ici 2030, elle espère y arriver avant Un beau défi pour une belle entreprise !

www.fleuriot.ch

MagicTomato :

L’entreprise MagicTomato est née de la volonté de son fondateur, Paul Charmillot, de privilégier un modèle durable de livraison à domicile de produits frais, faisant la part belle aux circuits courts et se fournissant chez les meilleurs artisans locaux. Fondée à Genève en 2016, la société s’est d’abord développée au bout du lac avant de reproduire avec succès son modèle d’écosystèmes d’artisans autour des villes de Lausanne, Montreux et, depuis peu, Berne. Pour chaque ville, les clients ont la possibilité de se faire livrer le jour même les produits d’une soixantaine d’artisans répartis dans un rayon de 25km autour de chez eux. La pandémie a été, pour cette jeune société, un accélérateur qui lui a permis d’illustrer ce qu’elle était capable de faire et de montrer comment elle pouvait aider les artisans à obtenir de nouveaux débouchés dans une période compliquée pour eux. Mais, revenons sur ce qui fait de MagicTomato un super héros de la durabilité.

 

Un objectif zéro gaspillage

La société basée à Plan-les-Ouates élimine à 99% le gaspillage d’aliments et l’utilisation d’emballages plastiques grâce à un système en circuits courts et une sélection rigoureuse de l’offre. Un travail quotidien de lutte contre le suremballage se fait en partenariat avec les artisans qui ont tendance à surprotéger leurs produits. La plupart des fruits et légumes sont ainsi regroupés dans des sacs compostables, eux-mêmes livrés dans de grands sacs en kraft réutilisables. La possibilité de commander en vrac dans des bocaux vient de s’ajouter aux options proposées aux consommateurs. En adhérant au club MagicTomato, les clients bénéficient gratuitement de cette option tout en valorisant la démarche écologique.

 

Des prix justes pour les artisans, une rémunération équitable pour les salariés

MagicTomato réalloue la grande majorité des montants dépensés en courses sur sa plateforme web aux artisans locaux, ce qui permet de pérenniser leurs activités et de perpétuer leur savoir-faire. La société tient également à proposer des prix justes pour ses clients et les artisans partenaires tout en assurant son fonctionnement. En discutant ainsi sans pression ni tabelles des prix qui seront affichés sur sa place de marché virtuelle, elle souhaite établir une relation de confiance, évidemment durable, avec l’ensemble de l’écosystème.

A contre-courant de l’ubérisation du travail, MagicTomato a, dès le départ, salarié l’ensemble de son équipe et a mis en place une politique équitable en matière de rémunération. Ce mode de fonctionnement nécessite de repenser les modèles classiques de gestion d’entreprise qui tendent à outsourcer les forces vives, c’est ce qui a d’ailleurs suscité quelques réticences auprès des banques lors du lancement du projet.

 

Des livraisons écologiques et un objectif zéro carbone pour 2030

Convaincue dès la première heure qu’il faut être durable sur toute la ligne, la jeune pousse réduit également son impact carbone en livrant à l’aide de véhicules électriques et en cargo-bikes rechargés à l’énergie renouvelable. Cette flotte représente évidemment des coûts additionnels conséquents, mais parachève un business model durable intransigeant.

« Au final, ce qui frappe réellement nos clients quand ils réceptionnent leurs courses, c’est de ne pas voir les montagnes de plastique qui emballent généralement les aliments de la grande distribution » relate avec fierté Paul Charmillot. MagicTomato estime ainsi avoir évité en 2020 plus de 26 tonnes de gaspillage alimentaire et des centaines de milliers d’emballage plastique, sans compter l’impact positif d’avoir réallouer plusieurs millions aux artisans locaux. Et le chef d’orchestre de cette belle logistique d’ajouter : « Nous recherchons plus que la génération de bénéfices. Nous voulons avoir un impact positif sur la société et sur la planète avec l’objectif d’avoir zéro émission carbone d’ici 2030 ».

www.magictomato.ch

 

 

Pour approfondir cette réflexion de durabilité, consultez le GUIDE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE :

A travers ce guide co-écrit par la Chambre de commerce, d’industrie et des services de Genève et la Banque Cantonale de Genève, vous découvrirez les actions durables qu’il est possible d’adapter à votre activité.

Plus que jamais nous savons que la planète souffre et que chaque contribution est précieuse pour la sauvegarder.

Par des comportements responsables, les entreprises véhiculent des informations qui permettront d’influencer, un tant soit peu, les acteurs avec lesquels elles sont en relation.